« Le tournoi des langues  » :
L’enseignement des langues étrangères
dans le système scolaire suédois, 1807-2003

Béatrice Cabau-Lampa

Cet article vise à analyser les divers enjeux qui ont déterminé la politique des langues étrangères dans le système scolaire suédois aux XIXe et XXe siècles. De fait, l’enseignement linguistique a toujours occupé une place prépondérante dans le système scolaire suédois, resté élitiste jusqu’à la création de l’école de base unique et obligatoire en 1962. Cet enseignement a évolué non seulement au gré des diverses réformes du système éducatif répondant aux transformations s’opérant au sein de la société, mais également au gré d’une succession d’influences étrangères.  La première partie de cet article est consacrée au développement du système scolaire suédois. Puis, le statut et l’organisation de l’enseignement des langues dans leur ensemble sont étudiés , avant que ne soient présentées les trois langues traditionnellement enseignées, à savoir l’allemand, le français et l’anglais. L’article se termine sur un état de la situation actuelle de l’enseignement des langues en Suède.

This paper analyses the various issues that influenced the foreign languages policy in the Swedish school system during the 19th and 20th centuries. In fact, language teaching has always occupied a dominant place in the Swedish school system, which remained elitist until the introduction of common compulsory basic schooling in 1962. Language teaching developed not only with different school system reforms in response to social transformations, but also with a succession of foreign influences. The first part of this article examines the development of the Swedish school system. Then, the status and organization of language teaching as a whole are analyzed, before examining the three foreign languages taught : German, French, and English. In conclusion, the article describes the current state of language teaching in Sweden.

Depuis plus de quarante ans, l’apprentissage de l’anglais est obligatoire en Suède pour tous les élèves à la grundskola, l’école de base obligatoire. Et depuis 1994, ces derniers sont également obligés de prendre une option linguistique, c’est-à-dire dans la plupart des cas, une deuxième langue étrangère (l’allemand, le français ou l’espagnol). En fait, l’enseignement linguistique a toujours occupé une place prépondérante dans le système scolaire suédois, resté élitiste jusqu’à la création, en 1962, de l’école de base unique et obligatoire. Ce choix répondait (et répond encore) à un besoin créé par la faible diffusion du suédois à l’étranger, laquelle a imposé que les Suédois apprennent la langue étrangère qui prédominait au cours des XIXe et XXe siècles dans le monde de la diplomatie, de la culture, du commerce, etc. En réalité, l’ouverture vers l’étranger est toujours apparue comme un paramètre vital : à partir véritablement du XVIIe siècle, les Suédois, ou plutôt la classe dirigeante suédoise a très tôt eu conscience du danger de sclérose culturelle et économique qu’un repli du pays sur lui-même pouvait engendrer. C’est ainsi que les influences étrangères – allemande, française et anglo-saxonne – se sont succédé dans ce pays nordique. Cette ronde des influences a eu une répercussion directe sur la priorité accordée à l'enseignement de telle ou telle langue.

Par ailleurs, l’enseignement linguistique a, en Suède comme ailleurs, évolué au gré des diverses réformes du système éducatif répondant aux transformations s’opérant au sein de la société. Ainsi, au cours du XIXe siècle, parmi les diverses questions alimentant les débats sur le rôle de l’éducation et le contenu de l’enseignement, deux seront essentielles : quelle place accorder au latin ? quelle langue vivante enseigner ? Cet article vise donc à analyser les divers enjeux qui ont déterminé la politique des langues étrangères dans le système scolaire suédois aux XIXe et XXe siècles[1].

Des sources primaires, telles que des décrets et ordonnances scolaires, des programmes d’enseignement ainsi que des rapports des commissions gouvernementales, ont été utilisées pour analyser l’importance et l’organisation de l’enseignement des langues dans le système scolaire suédois. Cette analyse a été complétée par l’étude de divers ouvrages traitant de l’enseignement des langues étrangères en Suède et du système scolaire de ce pays. La première partie de cet article sera d’ailleurs consacrée au développement de ce dernier. Puis, l’attention sera portée sur le statut et l’organisation de l’enseignement des langues, ainsi que sur les trois langues étrangères traditionnellement enseignées, à savoir l’allemand, le français et l’anglais. L’article se terminera sur un état de la situation actuelle de l’enseignement des langues, en prenant en compte les derniers développements observés depuis les années 1990.

Développement du système scolaire suédois

La première ordonnance scolaire suédoise remonte à 1571[2]. L’école secondaire ne comprend alors que trois ou quatre classes se déroulant chacune sur deux années. L’enseignement vise essentiellement à cette époque à former de futurs prêtres et le latin constitue la matière scolaire principale, avec la théologie et le chant religieux. Le Nouveau Testament a été traduit en suédois en 1526 et la Bible en 1541. Ces traductions ont joué un rôle essentiel : elles ont permis au protestantisme de favoriser l’accès aux Écritures par tous, devenu une priorité religieuse, ce qui a permis le prodigieux essor de l’alphabétisation en Scandinavie (l’enseignement de la lecture est rendu obligatoire pour toute la population par la loi ecclésiastique de 1686). En 1611, la scolarité est prolongée et le grec est introduit comme matière. C’est dans les années 1620 que l’appellation gymnasium (lycée) fait son apparition de façon officielle. En 1649, l’enseignement secondaire est scindé en deux types d’établissements publics : les écoles secondaires de premier cycle (trivialskolor) et celles de second cycle, les lycées, l’un comme l’autre d’une durée de scolarité de quatre années.

Dans les trivialskolor, les matières principales sont le latin, le grec, le suédois, la philosophie, la théologie et les mathématiques. En 1724, le programme est complété par l’enseignement de l’histoire biblique et laïque. Aux quatre classes de latin de la trivialskola va s’ajouter une classe apologist à orientation pratique, dans laquelle ne sont enseignées que la lecture, l’écriture et l’arithmétique, puis à partir de 1807, l’histoire biblique et laïque, les sciences naturelles et les langues vivantes. L’enseignement dispensé dans les classes apologist, duquel est exclu le latin, est proposé aux élèves ne désirant ou ne pouvant suivre leurs études au lycée et qui deviendront commerçants ou fonctionnaires subalternes. Au lycée, outre les matières religieuses, les élèves suivent des cours de physique, logique, rhétorique, histoire et mathématiques et, à partir de 1724, de géographie. Pour les élèves se destinant à une carrière administrative ou militaire, la formation offerte dans les lycées privés est plus adéquate et est souvent complétée par un voyage à l’étranger. En 1786, est ouverte la première école (privée) pour filles (flickskola), lesquelles n’ont pas accès à l’enseignement secondaire. Les écoles pour filles seront subventionnées par l’État en 1874.

L’ordonnance scolaire de 1807 peut être vue comme l’aboutissement des idées du Siècle des Lumières et des modifications de structure sociale. C’est en effet la première fois qu’un texte officiel mentionne que l’enseignement ne doit pas seulement s’adresser à des futurs prêtres ou fonctionnaires. Comme nous le verrons, cette date est essentielle dans l’histoire de l’enseignement des langues modernes, puisque l’allemand et le français sont désormais matières officielles, ainsi que l'éducation civique. Mais cette ordonnance n’a guère modifié le profil des lycées. Il faut dire que l’Église luthérienne dirige de main ferme les institutions éducatives et fait opposition à toute innovation. Les lycées restent donc principalement destinés aux futurs membres du clergé et fonctionnaires. Le latin y est resté la matière principale, bien que les sciences naturelles gagnent progressivement du terrain.

En 1812, un comité désigné par le gouvernement effectue une enquête sur le système éducatif. C’est à cette occasion que deux conceptions vont s’opposer et donner lieu à un débat où il sera question de la place que l’on doit accorder à l’enseignement du latin[3]. La première doctrine vise à l’utilitarisme en matière d’éducation, dans la lignée des idées de Rousseau et de Condorcet, notamment. Pour ses partisans, l’État se doit de répondre aux demandes émanant de toutes les classes sociales. L’enseignement ne doit plus, selon eux, s’adresser uniquement aux écoliers de condition sociale et économique privilégiée désirant entrer dans la fonction publique ou dans le clergé, mais également à ceux qui se destinent aux professions les plus diverses. Cette transformation du système éducatif est d’autant plus nécessaire que le pays voit le processus d’industrialisation se mettre en place, même si c’est encore à un rythme très lent. Pour les protagonistes de la doctrine opposée, l’éducation repose sur un idéal néo-humaniste, tout empreint de classicisme et de valeurs aristocratiques. L’utilité pratique immédiate de l’éducation est niée au profit du développement de l’intelligence, lequel est supposé être stimulé par l’apprentissage des langues classiques. Le clergé ne peut que défendre cette philosophie éducative s’il ne veut pas perdre son influence. Il s’oppose donc au désir des membres de la bourgeoisie et de la paysannerie de voir l’enseignement des sciences naturelles et des langues modernes occuper une plus grande place au niveau secondaire. Les matières académiques ne peuvent, selon ces derniers, répondre au besoin de donner une orientation plus professionnelle aux études secondaires. Cette lutte acharnée entre les deux idéaux ne s’estompera qu’en 1904, avec la création d’une école « moderne » (la realskola) dans laquelle l’enseignement du latin disparaîtra.

En 1820, les trois catégories d’établissements scolaires sont : l’école apologist (qui remplace les classes apologist), la lärdomsskola (l’appellation trivialskola disparaissant de façon officielle) pour le premier cycle du secondaire et, enfin, le lycée. Lors des débats qui se tiennent au sein du grand Comité pour l’Éducation créé en 1825 et réunissant les plus importantes personnalités de l’époque, les visées d’ordre politique et social des libéraux et des conservateurs s’affrontent : les premiers considèrent l’enseignement élémentaire comme un moyen de niveler les différences entre les classes par un brassage social, tandis que les conservateurs, en tant que représentants de l’Église, considèrent l’enseignement élémentaire comme un moyen de regagner le contrôle sur les gens et de préserver ainsi l’ordre social.

En 1840 est créé le ministère des Cultes (Ecklesiastik-departementet) qui ne sera remplacé qu’en 1967 par le ministère de l’Éducation. En 1842 est créée la folkskola (littéralement « école populaire »), par laquelle l’instruction primaire devient obligatoire, mais ne sera véritablement mise en place qu’à la fin du siècle. Cette instruction reste cependant limitée dans le temps, quatre à six années scolaires. Avec l’apparition de la folkskola, s’instaure un système scolaire parallèle dans lequel les enfants suédois peuvent se trouver dans les classes supérieures de l’école primaire ou les classes élémentaires de la lärdomsskola. La principale différence entre elles est que les dernières accordent plus d’importance aux langues étrangères. Ce système parallèle sera conservé jusque dans les années 1960.

En 1849, les apologistskolor sont regroupées avec les lärdomsskolor pour former l'enseignement secondaire du premier cycle qui comporte deux classes communes pour tous les élèves (lesquelles seront conservées jusqu’en 1878). Les langues mortes restent prédominantes après cette réforme. En 1856, l’enseignement secondaire comporte huit années de scolarité et deux filières (classique et moderne) sont créées. L’enseignement du latin, de l’hébreu et du grec n’est plus obligatoire, sauf dans la filière classique. En 1878, l'enseignement secondaire du premier cycle est constitué, d’une part, de ce que l’on pourrait désigner par un cours supérieur sanctionné par un examen (studentexamen) et, d’autre part, d’un cours moyen avec un nombre d’années d’études moindre et sans examen.

En 1905 est créée la realskola, laquelle répond à la nécessité de s’adapter aux besoins de la société dans laquelle l’industrie et le commerce jouent un rôle déterminant. Le latin disparaît du programme de ces établissements secondaires de premier cycle et il n’existe plus de filières. La scolarité dans la realskola se déroule durant six années entre la folkskola (école primaire) et le lycée. Le realexamen qui sanctionne ces études permet aux élèves d’origines sociales très diverses d’accéder à des postes de la fonction publique. Mais l’accès au gymnasium, qui s’effectue à la fin de la 5e année (et non pas de la 6e) de la realskola, reste réservé à une certaine élite et seuls ceux qui obtiennent le studentexamen pourront poursuivre leurs études à l’université. Le lycée comporte toujours deux filières, avec trois ou quatre années de scolarité. En 1907, les filles ont accès à l’enseignement secondaire du premier cycle et, dans les années 1920, au second cycle. En 1927, les élèves peuvent entrer à la realskola généralement après la quatrième année de folkskola.

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la principale préoccupation des responsables suédois de l’éducation est la création de la future « école de base » (grundskola, qui doit remplacer la folkskola, la realskola ainsi que la flickskola) dont il a été question tout au long de la première moitié du XXe siècle. Une commission d’enquête sur l’éducation est nommée en 1946 par le Parlement pour décider de la ligne de conduite à suivre pour que s’opère une démocratisation de l’instruction publique. Les diverses propositions émises par cette commission[4] trouvent leur origine dans le principe que l’organisation scolaire, c’est-à-dire non seulement la nouvelle école de neuf ans mais aussi le lycée, doit s’adapter « à la structure sociale de l’époque et aux besoins culturels » dans un pays qui se trouve effectivement « dans un processus de transformation sociale »[5]. La Suède doit posséder une main-d’œuvre qualifiée et spécialisée, et l’accès à l’enseignement secondaire doit être élargi et planifié selon ces besoins. Les années 1950 vont être une période d’activités-pilotes qui se mettent en place dans les deux cycles en suivant les recommandations de la Commission de 1946.

En 1962, la réforme de l’école obligatoire institue l’école de base de neuf ans : tous les enfants de 7 à 16 ans doivent fréquenter la même école et recevoir la même éducation de base. Le but de cette réforme consiste en la réalisation de l’uniformité de l’éducation concrétisée par l’abolition des anciennes différences entre les écoles fréquentées par les enfants de classes aisées et celles où étaient regroupés les enfants d’origine plus modeste. Cela revient à ce que l’école devienne l’instrument pour l’accomplissement d’une plus grande égalité sociale. La diversité en matière de contenu du programme scolaire suivant la filière et les options choisies provoque le besoin d’uniformiser le système : avec le second plan d’enseignement de 1969, le système de filières est supprimé, ces filières étant remplacées par des matières optionnelles; l’école de base est unifiée, avec un programme indifférencié pour tous les élèves tout au long de la scolarité obligatoire[6]. Nous verrons plus tard l’impact du dernier plan d’enseignement sur l’organisation de l’enseignement des langues.

La création de l’école de base en 1962 entraîne un besoin de réorganisation de l’infrastructure des lycées. Celle-ci va s’opérer en 1963-1964 avec la constitution de cinq sections : lettres, sciences sociales, économie, sciences naturelles et techniques. Au début des années 1970, l’enseignement secondaire, l’enseignement technique et l’enseignement professionnel sont regroupés en un système unique et intégré qui comprend 22 options théoriques et pratiques (économie, lettres, sciences naturelles, sciences sociales, etc.) pour une durée d’études variant de deux à quatre années. Un important remaniement de l’école secondaire s’est effectué à la rentrée 1992. Tous les élèves de n’importe quelle filière (il y en a 17 depuis 2000) peuvent, sous certaines conditions et réglementation (à savoir de bonnes notes et inscriptions en nombre limité en médecine, psychologie, par exemple), accéder à l’enseignement supérieur.

Vue d’ensemble de l’enseignement des langues

C’est à partir du XVIe siècle que le besoin de connaissances en langues étrangères se fait ressentir à la Cour, dans l’armée et le commerce. Ce sont les connaissances en allemand qui sont le plus prisées dans la plupart des domaines, mais le français devient de plus en plus présent dans le quotidien du courtisan et du commerçant suédois ; on notera également le rôle non négligeable joué par le néerlandais dans les échanges commerciaux. À cette époque, l’anglais ne provoque presque aucun intérêt chez les Suédois[7].

La politique étrangère expansionniste menée par Gustave II Adolphe au début du XVIIe siècle oblige les dignitaires suédois à s’intéresser de plus près aux langues étrangères qui leur sont nécessaires dans les relations entretenues avec les autres nations. Le chancelier Skytte (1577-1645), précepteur du roi, a contribué à valoriser l’enseignement des langues étrangères en démontrant l’importance des sciences profanes. Cet enseignement est déjà présent dans les universités suédoises au XVIIe siècle : outre celles d’Uppsala et de Lund, citons également celles d'Åbo (l'actuelle Turku en Finlande), celle de Dorpat (l'actuelle Tartu en Estonie), ainsi que celle de Greifswald en Poméranie suédoise (de nos jours, en Allemagne). Il faut y voir là l'influence de la noblesse. Mais les langues vivantes ne sont vues qu'en tant qu'« exercices nobles », au même titre que la danse, l'escrime et l'équitation et ne sont pas associées à la science et au savoir comme les langues anciennes : aucune chaire académique ne leur est consacrée et les enseignants ne sont pas des professeurs mais des maîtres de langue. Néanmoins, lors du règne de Christine (1644-1654), sont créés à l'université d’Uppsala les lectorats de français, d’italien, puis d’espagnol. Au cours du XVIIIe siècle, la Suède vit son « Ère de liberté » (Frihetstiden, 1718/19-1772). Le nouveau courant de pensée accentue l’ouverture vers l’étranger et les langues étrangères commencent à s’imposer en tant que moyens pour accéder à de nouvelles connaissances et idées. Mais dans l’ordonnance scolaire de 1724, il n’est toujours pas question d’enseignement de langues modernes[8].  Par contre, l’école militaire de Karlskrona (1756-1792) accorde une grande importance à ce dernier, et tout particulièrement au français[9].

C’est par l’ordonnance scolaire de 1807 que les langues modernes, l’allemand et le français, font leur entrée timide dans l’enseignement secondaire en tant que matières officielles dans les apologistskolor ainsi que dans les lycées, mais pas dans les écoles de filière classique, les lärdomsskolor. Mais l’importance pour ces matières linguistiques reste encore limitée, avec seulement quatre heures de cours hebdomadaires. Les cours particuliers constituent encore une voie éducative très sollicitée. Dans les années 1820, l’idée que les langues modernes devraient occuper une plus grande place dans les filières non littéraires commence lentement à s’imposer. À partir de la moitié du XIXe siècle, l’allemand devient la première langue enseignée et, en 1895, matière obligatoire pour tous les élèves, tout au long de la scolarité du secondaire.

L’augmentation du nombre de cours d’anglais dans l’enseignement secondaire s’opère en même temps que l’acheminement vers l’acceptation du concept d’école civique ouverte à tous, qui se concrétisera en 1905. La première place de l’allemand n’est pas remise en cause lors de la création de la realskola. Toutefois, en 1922, l’anglais est pour la première fois proposé comme première langue enseignée. Cependant, cette proposition est rejetée, comme nous le verrons plus tard[10].

Dans les travaux d’élaboration d’un système scolaire unique et obligatoire, le débat quant à savoir quelle doit être la première langue enseignée trouve tout naturellement sa place. Le rapport publié par la commission de 1946 constitue une pièce maîtresse dans l’histoire de l’enseignement des langues en Suède[11]. La décision prise en 1946 d’accorder à l’anglais la première place découle de l’expérience des activités-pilotes menées à partir de 1939. Il est évident que la défaite allemande d’une part, et la victoire des Alliés, d’autre part, ont fait sérieusement pencher la balance du côté de l’anglais. L’enjeu aussi bien politique qu’économique revêt ici une importance toute particulière. Dès l’introduction, les auteurs du rapport exposent l’une de leurs préoccupations principales, à savoir la place qui doit être accordée à l’enseignement des langues :

« Un défaut, ressenti d’un point de vue civique, dans le programme actuel des matières de l’école obligatoire est l’absence de l’enseignement de langues étrangères. Jusqu’à présent, les connaissances en langues étrangères ont été réservées à une minorité, à savoir les gens cultivés. Si une langue étrangère est introduite en tant que matière obligatoire durant la durée de scolarité requise (et le choix se portera vraisemblablement sur l’anglais), le clivage creusé par l’ancienne éducation devrait ainsi être au moins passablement comblé. Une fenêtre sur le monde devrait s’ouvrir pour la grande masse de citoyens »[12].

Outre le constat effectué selon lequel le système éducatif suédois était élitiste, cet extrait dénote la volonté des membres de la commission :

-  d’abolir l’image de l’enseignement des langues étrangères qui faisait voir celui-ci comme réservé à une élite, ce qui allait contre la perspective civique et démocratique de l’éducation ;

- d’introduire à l’école de base l’enseignement obligatoire d’une langue étrangère (qui serait l’anglais) pour l’offrir à la majorité des (futurs) citoyens, suivant de cette façon le principe d’une école démocratique ;

- de  répondre  aux besoins des Suédois, pour qui la connaissance d’une langue étrangère (surtout l’anglais) devient de plus en plus indispensable dans leur activité professionnelle ;

- de voir dans l’apprentissage de l’anglais le moyen par lequel la majorité des Suédois pourront comprendre et connaître ce qui se passe dans le monde. L’ouverture sur l’étranger n’est plus réservée à une minorité.

Toujours selon le rapport de cette commission, les écoliers suédois devraient aussi, dorénavant, avoir l’occasion (mais non l’obligation) de suivre l’enseignement d’une deuxième langue étrangère en 7e année, l’allemand, et même d’une troisième en 9e (et dernière) année, le français. L’apprentissage des langues conserve néanmoins une image élitiste, sauf qu’apprend les langues celui qui le peut, non plus en considération de son origine sociale, mais de ses capacités. Des termes comme « don », « doué », « talent », « intelligence », « faibles », « groupes de niveaux » et même « élite » sont éloquents. Ces idées, que l’on ne retrouvera pas dans les textes qui suivront, car bannies, sont clairement exprimées ici :

« Des dispositions manifestes pour les langues ne pourraient que difficilement se rencontrer chez des individus moyennement doués intellectuellement. Dans tous les cas, nous devons tenir compte qu’un certain niveau minimum d’intelligence ordinaire est nécessaire pour qu’en général, un individu soit doué pour les langues »[13].

Mais les membres de la Commission sont tout à fait conscients que les méthodes utilisées dans l’enseignement des langues, axées essentiellement sur l’acquisition de règles de grammaire, ne faisaient appel qu’à une forme d’intelligence. C’est ce qu’ils jugent avoir constitué « une erreur pédagogique ».

Au niveau du lycée, lequel comportera trois filières (classique, générale et scientifique), l’anglais devient également la langue principale, les autres langues optionnelles étant : l’allemand, le français, l’espagnol et le russe. Pour les élèves qui désirent poursuivre des études supérieures et donc, qui « dans le futur, […] seront appelés à occuper les postes-clés au sein de la vie culturelle suédoise »[14], les matières linguistiques occupent une place substantielle, et cela, plus particulièrement dans la filière de latin (ou des langues, comme elle est quelquefois nommée). Cette dernière filière s’adresse aux élèves qui se destinent à des professions de traducteurs, d’écrivains, de journalistes artistiques, d’éditeurs ou de libraires. L’existence de filières est justifiée par la place que les élèves désirent accorder à l’apprentissage des langues. Pour suivre des études à l’université, les lycéens doivent en avoir appris trois.

Avec le premier plan d’enseignement de l’école unique, le Lgr 62 de 1962, l’apprentissage de l’anglais devient obligatoire pour tous les élèves à partir de la 4e année scolaire. La même année, le français devient comme l’allemand la seconde langue étrangère enseignée. Les élèves peuvent également choisir de ne suivre des cours de français ou d’allemand que pendant deux années. L’apprentissage de l’allemand ou du français est optionnel, mais obligatoire pour les élèves désirant poursuivre leurs études au lycée. Cet apprentissage est proposé selon deux voies au stade supérieur (les trois dernières années de l’école de base), la différence entre les deux se trouvant dans le nombre de cours.

Après la disparition du système de filières et d’orientations introduit par le second plan d’enseignement de 1969, le Lgr 69, le nombre de cours hebdomadaires d’allemand et de français a été quelque peu réduit et les élèves ne sont plus obligés d’avoir étudié le français ou l’allemand pour pouvoir entrer au lycée. Néanmoins, environ 60 % des élèves choisissent une de ces langues comme option. Outre cette option linguistique, trois autres choix sont proposés : la technologie, les arts graphiques et l’économie domestique. L’origine sociale semble demeurer un facteur essentiel dans le choix de l’option : les élèves issus de la classe sociale moins favorisée ont tendance à opter pour une matière non linguistique, à la différence de ceux issus d’un milieu favorisé[15].

Le troisième plan d’enseignement, le Lgr 80 adopté en 1980, accorde la même durée d’apprentissage à l’anglais et à la deuxième langue étrangère que le Lgr 69. Il est à noter que, lors des débats menés pour l’élaboration du Lgr 80, il a été question de savoir si l'apprentissage d’une seconde langue étrangère devait être obligatoire ou totalement supprimé pour se conformer à la logique de l’école unique. Il était à l’époque jugé irréaliste d’imposer l’apprentissage d’une seconde langue. Mais comme les représentants du monde de l’industrie et du commerce ont énergiquement protesté contre la suppression de cet apprentissage à l’école de base, le compromis trouvé a consisté à préserver le système d’option alors existant qui faisait de l’allemand et du français des matières facultatives[16]. Nous verrons dans la partie consacrée à la situation de l’enseignement des langues depuis les années 1990 que cette question est toujours d’actualité.

L’enseignement du français : de l’élitisme à la démocratisation

Le goût, les modes et l'esprit français s'imposent véritablement à la Cour de Suède au XVIIIe siècle sous l'influence de Louise-Ulrique, épouse du roi Adolphe-Frédéric (1710-1771), qui a reçu une éducation française. La gallomanie de son fils Gustave III (1746-1792) jouera un rôle essentiel en accordant la primauté à la langue et la culture françaises. À cette époque, la langue de Voltaire est devenue la lingua franca des membres de la classe privilégiée, et même pour certains, une « seconde langue maternelle »[17]. En 1792, s'achève l'ère de la divulgation de la culture et de la langue françaises avec l'interdiction imposée par Gustave III (qui sera assassiné la même année) d'importer les livres, gazettes et périodiques venant de la France révolutionnaire et de faire allusion aux événements qui s'y déroulent. Désormais, le regard des Suédois va se tourner vers l'Allemagne, et non plus vers la France.

Nous avons vu que le français, comme l’allemand, est devenu matière officielle dans les apologistskolor ainsi que dans les lycées en 1807. L'enseignement du français est alors devenu accessible aux personnes issues d'un milieu social moins favorisé, car avant cette date, presque tous les établissements dispensant des cours de français étaient privés. En effet, ce qu’il convient de souligner ici, c’est que l’influence de la langue et de la culture françaises s’est exercée à une époque où l’enseignement des langues étrangères s’effectuait essentiellement dans le cadre privé. Lorsque cet enseignement fait son apparition dans l’enseignement secondaire au début du XIXe siècle, il est déjà trop tard pour le français pour s’imposer comme première langue enseignée[18].

En 1856, l’enseignement du français connaît un dernier et éphémère regain (qui ne durera que trois années) en tant que première langue enseignée. Il y a fort à penser que l’influence d’Oscar I (le fils de Bernadotte devenu Charles XIV Jean en 1818), jointe à celle du Ministre des Cultes de l’époque (Lars Anton Anjou, Ministre de 1855 à 1859, descendant d’une famille wallonne), n’est pas étrangère à cette très brève période de prépondérance du français sur l’allemand. Cette influence royale, dont il est difficile d’estimer l’ampleur, n’a, quoi qu’il en soit, été qu’extrêmement limitée dans le temps, dans la mesure où Oscar I a été frappé d’aliénation mentale en 1857 et a dû laisser la régence à son fils, le futur Charles XV, en 1859. Et c’est justement à partir de cette année-là, date d’un nouveau décret scolaire, que le nombre de cours hebdomadaires de français ne va cesser de diminuer. En 1878, le français est dépassé par l’anglais. En 1905, il est absent de l’emploi du temps de la realskola et son apprentissage, qui subsiste tout de même dans les deux filières, est repoussé en seconde année de lycée. C’est le grand perdant de ce « tournoi des langues ». En fait, il est relégué à la troisième place avec l’importance que prend la langue anglaise. En 1933, le français devient obligatoire dans la filière de latin des lycées et dans les premières années de la filière moderne. À cette époque, les élèves doivent avoir étudié le français pendant deux années à la realskola pour entrer au lycée.

L’année 1962 constitue une étape décisive dans l’histoire de l'enseignement du français en Suède : en effet, c’est la première fois au cours de ce XXe siècle qu’il occupe, au même rang que l’allemand, la position de seconde langue enseignée, avec un nombre égal de cours hebdomadaires répartis sur les trois dernières années de l’école de base. L’accès aux études de français, offert à tous les élèves dans le cadre de l’école unique et obligatoire, fait que cette matière n’est plus dorénavant uniquement destinée aux élèves désireux de poursuivre leurs études au lycée et qu’elle a, du moins en grande partie, perdu son image de langue réservée à une certaine élite. On peut dire que le français a – comme l’anglais mais dans une moindre mesure, nous le verrons,  – récolté à cette époque les fruits de la démocratisation du système scolaire suédois.

En fait, le français a longtemps souffert de son image de langue cultivée ou savante à caractère élitiste par la place qu'il occupait dans le système scolaire avant la création de l'école de base. De nos jours, il pâtit de sa réputation de langue difficile, laquelle se trouve renforcée par l'instauration de l'espagnol sur un pied d’égalité avec le français et l’allemand, lequel bénéficie de la réputation de langue facile. Il pâtit également de l'assez faible enjeu économique que constitue l'apprentissage du français pour les Suédois, par rapport aux relations commerciales plus intenses entre la Suède et l'Allemagne, et enfin, de l'obligation qui incombe aux communes de ne proposer que deux langues sur les trois instituées langues B depuis le milieu des années 1990.

L’enseignement de l’allemand, l’héritier du latin

Les courants d’influence allemande à travers le temps se sont fait ressentir en Suède à différentes périodes : lors de l’arrivée des commerçants de la Ligue hanséatique (1150-1650), de la Réforme et de l’implantation de la doctrine luthérienne ; puis au début du XIXe siècle, avec l’influence du romantisme allemand sur les poètes et érudits suédois conjuguée à l’hégémonie de la culture et de la science allemandes au temps de Guillaume II (1888 à 1918) et de la République de Weimar (1919-1933) ; enfin, durant le IIIe Reich, lors de l’exil d’Allemands en Suède[19]. Les étroites relations qu'entretiennent alors les deux nations, principalement pendant l'époque de la Ligue hanséatique, ont comme conséquence une importante influence de l'allemand sur la langue suédoise; c’est ainsi que des termes allemands vont être introduits dans la vie sociale et culturelle suédoise. Au XVIIe siècle, est adopté le système universitaire allemand. L’allemand sert de langue diplomatique au même titre que le latin.

En 1859, la langue germanique devient la première langue étrangère enseignée. C’est elle qui va prendre le relais du latin en tant que « langue fondamentale » (“grundlegende Sprache”), c’est-à-dire propre à former l’esprit, à développer la compréhension des élèves, etc. Elle n’est nullement appréhendée dans la logique de l’utilitarisme allant dans le sens de la démocratisation de l’instruction publique ou dans celle de son utilité pratique immédiate, mais dans un idéal néo-humaniste imprégné de classicisme et de nobles valeurs. L’allemand incarne donc l’héritier du latin et avec lui se perpétue la méthodologie traditionnelle où règnent la grammaire et la traduction.

La décision prise en 1878 par le Parlement suédois d’augmenter le nombre de cours d’allemand n’est certainement pas due au hasard : à cette époque, forte de sa victoire dans la guerre contre la France, l’Allemagne du IIe Reich va devenir une des premières puissances mondiales. La Suède ne peut pas se permettre de négliger la proximité de cette nation voisine. En 1895, l’allemand devient matière obligatoire pour tous les élèves, de la première à la dernière année de scolarité dans l’enseignement secondaire. Il est le grand vainqueur au niveau de la realskola de 1905 : 29 heures de cours hebdomadaires sur les six années de premier cycle (contre 14 pour l’anglais et 0 pour le français).

Le fait que la classe dirigeante et le milieu intellectuel suédois (où l’on trouve l’historien Geijer et le poète Tegnér, pour ne citer qu’eux) soient dans leur grande majorité germanophiles, joue évidemment un rôle prépondérant dans le choix, réitéré pendant près d’un siècle, d’accorder la priorité à l’allemand dans l’instruction publique. De plus, ce choix linguistique est largement dû à l’admiration que portent les pédagogues suédois au système scolaire allemand, ou plus précisément prussien, posé en tant que modèle à suivre. À cette époque, l’Allemagne est désignée en tant que « patrie de la pédagogie » et la Suède en tant que « province pédagogique de l’Allemagne »[20]. Tout Suédois cultivé se doit alors d’apprendre cette langue germanique, comme cela avait été le cas avec le français au cours du siècle précédent.

Mais aussi forte qu’a pu être l’influence allemande, la défaite allemande de 1918 va accentuer le détachement que les Suédois commencent à ressentir à l’égard de la nation germanique. Ce détachement va principalement s’effectuer sur deux niveaux : celui des relations culturelles et celui de l'enseignement linguistique, les relations économiques quant à elles n’en étant pas affectées. L’apprentissage de l’allemand va entrer dans une période de déclin. Les Suédois tournent de plus en plus leur regard vers la Grande-Bretagne et les États-Unis. Lorsque la Commission de 1946 propose d’instaurer l’anglais en tant que première langue obligatoire, l’allemand voit s’achever sa prépondérance qui s’exerçait depuis près d’un siècle. À la création de l’école unique de 1962, l’allemand n’est proposé qu’en tant qu’option (comme le français).

À la différence du français, l’allemand est essentiellement choisi par les élèves pour sa valeur utilitaire et fonctionnelle, à une fin pratique et professionnelle. Plusieurs facteurs jouent de nos jours en faveur de l’enseignement de l’allemand en Suède : l'Allemagne est le plus important partenaire commercial de la Suède ; la proximité géographique ; l'allemand est la langue maternelle la plus parlée dans l’Union européenne ; le tourisme (les Allemands représentent le groupe le plus important d’étrangers venant passer leurs vacances en Suède) ; la réputation de langue moins difficile que le français ; l’image de langue « utile » et liée au monde de la technologie.

L’enseignement de l’anglais : à la conquête de la première place

Si l’influence anglo-américaine s’est produite nettement plus tard en Suède que celle provenant de France et d’Allemagne, elle n’est nullement moins importante pour ce qui est de son ampleur et de sa diffusion. Cependant, entre la moitié du XIXe siècle et le début du XXe, l’importance grandissante de l’anglais au sein de l’enseignement secondaire est loin de remporter l’unanimité. En fait, le « tournoi des langues » qui se déroule à cette époque reflète une confrontation d’intérêts essentiellement sociaux : les milieux dirigeants (l’État et l’Église) paraissent s’opposer à l’expansion de l’anglais, qui devient un adversaire de poids pour l’allemand, alors que les classes bourgeoise et ouvrière voient dans l’apprentissage de l’anglais le moyen d’acquérir des connaissances désormais nécessaires dans leur vie quotidienne et professionnelle. L’anglais est envisagé en tant que facteur de promotion sociale. Ces connaissances linguistiques concernent autant les candidats à l’émigration vers les États-Unis que les personnes désireuses de réussir dans le commerce ou dans la navigation maritime[21]. En effet, la part des échanges commerciaux entre la Suède et l’Angleterre supplante celle des échanges entre la Suède et l’Allemagne sur le marché suédois. Par ailleurs, la Suède tend peu à peu à s’industrialiser au cours de la seconde moitié du XIXe siècle et la société suédoise doit être à même de répondre aux nouveaux besoins qui font leur apparition. On peut dire que l’anglais a tardivement récolté les fruits du processus de démocratisation de l’instruction publique. À la différence de ce qui s’est passé avec le français, puis l’allemand, ce ne sont pas les membres de l’élite suédoise qui ont mis en avant la nécessité d’apprendre cette « nouvelle » langue étrangère qu’était l’anglais : ce sont plutôt les membres de la bourgeoisie, qui, devenus assez puissants pour avoir pleinement le droit à la parole, ont compris l’enjeu économique que représentait l’apprentissage de l’anglais dans le domaine de l’industrie, dans le commerce, etc. Un autre facteur a joué en faveur de l’enseignement de l’anglais, à savoir le phénomène d’émigration vers les États-Unis à partir de la seconde moitié du XIXe siècle. De fait, à la fin du XIXe siècle, la Suède se tourne de plus en plus vers l’Angleterre et les États-Unis, pays dont l’expansion politique, économique et culturelle va de plus en plus se faire sentir à différents niveaux de la vie quotidienne suédoise. Les Suédois commencent à s’intéresser à la politique libérale menée par ces deux puissances, au phénomène de révolution industrielle qui bat son plein, aux divers mouvements populaires qui y sont créés, à la littérature anglo-saxonne, aux sports qui y sont pratiqués... De nombreuses publications anglaises arrivent en Suède, divulguant les nouvelles innovations technologiques.

C’est en 1839 que l’anglais fait son apparition dans les apologistskolor. Puis, il fait une entrée timide dans les programmes de 1849 par rapport à l’allemand, mais est bel et bien obligatoire dans la filière moderne. Dès 1859, il devient la deuxième langue enseignée, même si son nombre d’heures d’enseignement reste inférieur à celui du français. En 1878, il fait partie du programme du premier cycle de l’enseignement secondaire et même d’une section de la filière classique. L’augmentation du nombre de cours d’anglais dans l’enseignement secondaire s’opère en même temps que l’acheminement vers l’acceptation du concept d’école civique ouverte à tous, qui se concrétisera en 1905. C’est en 1922 que l’anglais, pour la première fois proposé par voie officielle, devient la première langue enseignée. On peut y voir là un des effets de la défaite allemande à l’issue de la Première Guerre mondiale. Pour la Commission d’enquête sur l’éducation de 1922, instaurer l’allemand comme première langue étrangère représente l’héritage indirect laissé par le latin dont l’apprentissage se basait sur l’étude de la grammaire et les exercices de traduction. Or, pour les membres de la Commission, la grammaire ne doit se voir accorder qu’une place secondaire, au profit de la langue elle-même. L’anglais leur semble plus adapté d’un point de vue pédagogique aux capacités des élèves de première classe de realskola. De plus, l’apprentissage de l’anglais est analysé dans la perspective de son utilité pratique : devenu « langue universelle », il est considéré comme du plus grand intérêt pour l’ensemble des divers domaines d’activités du pays.

La proposition de la Commission est refusée, mais plusieurs établissements participent à partir de 1939 à des activités-pilotes, dans lesquelles l’allemand est remplacé par l’anglais en tant que première langue étrangère. La décision prise en 1946 d’accorder à l’anglais la première place dans l’apprentissage linguistique dans le cadre scolaire découle de l’expérience de ces activités. Cette mesure doit constituer une étape cruciale dans le processus de démocratisation de la société suédoise. De plus, on distingue l’allemand de l’anglais en donnant de ce dernier une image de facilité d’apprentissage :

« L’enseignement de l’anglais doit être effectué de façon que la matière soit moins exigeante que ne l’était l’allemand à la même place [de première langue étrangère] »[22].

En fin de compte, l’introduction de l’anglais, qui n’est pas une langue d’élite comme l’était l’allemand, en tant que première langue étrangère enseignée doit être vue comme allant dans le sens de la démocratisation de l’école et son apprentissage ne doit pas rebuter les élèves. En 1962, l’apprentissage de l’anglais devient obligatoire et débute en 4e année d’école de base. Il est à noter qu’en 8e et 9e années, ce n’est qu’une matière optionnelle. Néanmoins, en 1969, il devient obligatoire jusqu’à la fin de la scolarité obligatoire. Depuis 1994, son étude peut commencer dès la première année de scolarité, la décision en revenant aux communes.

Récents développements dans l’enseignement des langues

Lorsque le gouvernement de coalition de droite a accédé au pouvoir en 1991, le ministre de l’Éducation a souligné l’importance de renforcer l’enseignement des langues dans le système scolaire, principalement dans la perspective de l’admission du pays dans l’Union européenne en 1995. Dans le nouveau plan d’enseignement de 1994 (le Lpo 94[23]) et le nouveau plan de cours pour les langues étrangères à l’école de base (qui, comme les autres, est appliqué depuis la rentrée scolaire 1995-1996), il est effectivement question de l’intensification de l’internationalisation et de ses effets sur l’éducation, ce qui entraîne la nécessité d’« accroître la compréhension des autres cultures ». Dans l’avant-propos du Lpo 94, la compétence de communication orale et écrite en langue maternelle comme en langue étrangère est présentée comme le moyen d’* augmenter les opportunités d’agir en tant que citoyen actif ». Il est utile de mentionner que le pays entrait alors dans une profonde récession et les compagnies suédoises se devaient d’augmenter leur compétitivité. Les connaissances en langues étrangères de la population active étaient considérées comme pouvant y contribuer.

Chaque élève de l’école de base doit désormais prendre une option linguistique : une deuxième langue étrangère, sa langue maternelle, le suédois, le suédois langue seconde, l’anglais renforcé ou bien le langage des signes. Chaque école doit proposer au moins deux des trois langues instituées langues B, à savoir l’allemand, le français et l’espagnol, ce dernier étant dorénavant placé sur un pied d’égalité avec les deux autres langues. Comme nous l’avons vu, la question de l’enseignement obligatoire d’une deuxième langue étrangère s’était déjà posée dans les années 1980. En Europe, outre la Suède, seuls trois pays ont adopté la même mesure : le Luxembourg, l’Islande et l’Estonie[24].

Le nombre de cours consacrés à l’apprentissage d’une seconde langue à l’école de base a considérablement augmenté : de 246 depuis l’introduction du Lgr 80, il est passé à 320 sur l’ensemble de la scolarité, soit une augmentation de 30 %. Le nombre de cours d’anglais reste, lui, presque inchangé. C’est à chaque établissement de décider quand les cours doivent débuter : à l’heure actuelle, environ le tiers des élèves suédois commencent l’apprentissage de l’anglais dès leur première année de scolarité, et non plus la quatrième, comme c’était généralement le cas jusqu'alors. L’enseignement d’une troisième langue étrangère peut être désormais également proposé aux élèves en dernière année.

La principale raison pour laquelle l’apprentissage d’une deuxième langue étrangère a été décrété obligatoire était le trop faible nombre d’élèves suédois sortant du lycée ayant étudié une autre langue que l’anglais. Dans les années 1980 et au début des années 1990, sur 100 000 élèves du même âge, environ 60 000 choisissaient une option linguistique en 7e année. Or, à la sortie du lycée, ces mêmes élèves n’étaient plus que 15 000 à avoir poursuivi jusqu’au bout l’apprentissage de leur langue B (l’allemand ou le français)[25]. Néanmoins, à la grande déception des décideurs de l’éducation, un élève sur cinq (la plupart du temps un garçon) abandonne ses cours de langues : sur environ 79 % des élèves de 7e année commençant l’apprentissage d’une deuxième langue étrangère, il n’y en avait plus que 64 % en 2003-2004 en 9e et dernière année d’école de base. Les élèves effectuent un choix tactique, à savoir que, dès que le niveau des connaissances attendu devient trop difficile à atteindre, les jeunes Suédois abandonnent leurs cours de langue B pour opter pour des cours de soutien de suédois ou d’anglais[26]. Déjà en juin 2001, le ministre de l’Éducation avait déclaré « alarmant » l’intérêt décroissant pour les cours de langues[27]. Pourtant, cet échec est quelque peu nuancé par le fait que le nombre d’apprenants de langue B a augmenté d’environ 10 % depuis le milieu des années 1990.

Alors que l’allemand est depuis plusieurs décennies la deuxième langue étrangère la plus étudiée, il ne cesse de perdre du terrain : en 2003-2004, 27,5 % d’élèves de l’école de base l’étudiaient en 9e année contre 38 % en 1994-1995[28]. Par contre, l’intérêt pour l’apprentissage du français semble persister, voire augmenter : en 2003-2004, plus de 18 % des élèves de dernière année d’école de base étudiaient le français, contre 13 % en 1994-1995[29]. L’augmentation du nombre d’apprenants de langue B mentionnée plus haut est principalement due à la popularité croissante de l’espagnol, laquelle s’explique par l’importance des échanges commerciaux et du tourisme, ainsi que par les mouvements d’émigration et d’immigration, sans oublier son image de langue facile : alors qu’il n’était étudié que par environ 5 % d’élèves de 9e année en 1998-1999, les chiffres respectifs pour 2003-2004 s’élevaient à plus de 18 %. L’espagnol est donc devenu non seulement aussi populaire que le français et risque de le devancer d’ici peu, mais il pourrait également se poser comme un sérieux concurrent à l’allemand et devenir ainsi la deuxième langue étrangère la plus étudiée.

Le renforcement de l’enseignement des langues introduit par le Lpo 94 ne s’est pas accompagné de mesures correspondantes à l’école secondaire. Avec la réforme des plans de cours de 2000, un nouveau modèle de description des objectifs à atteindre pour l’apprentissage linguistique a été introduit sur la base de sept niveaux (contre six dans le Cadre européen commun de référence pour les langues). Par souci de continuité, il s’applique aussi bien à l’école obligatoire qu’au lycée avec le premier niveau correspondant au niveau débutant et le dernier au plus haut niveau pouvant être atteint au lycée. Ce nouveau système de structure uniforme est supposé faciliter une progression plus claire d’un niveau à l’autre et la comparaison au niveau international[30]. À l’école de base, le niveau 4 correspond à la 9e année pour l’anglais et pour les langues modernes (nouvelle désignation des langues B), seuls existent les deux premiers niveaux. Les niveaux 5, 6 et 7 pour les cours de langues modernes au lycée n’existaient pas dans l’ancien système. Chaque niveau est défini selon les objectifs à atteindre par l’élève, lesquels sont identiques pour l’anglais et la deuxième langue étrangère. En 9e année, des critères d’évaluation pour les notes « bien » et « très bien » sont définis en anglais niveau 4 et en seconde langue niveaux 1 et 2. Dans la mesure où le niveau 2 des langues modernes est un peu moins élevé que celui décrit dans l’ancien plan de cours, les élèves sont censés avoir plus de temps pour atteindre les objectifs d’apprentissage, ce qui pourrait les inciter à choisir plus volontiers une deuxième langue étrangère. Au lycée, les critères existent pour les notes « passable », « bien » et « très bien » pour tous les cours de langue. Chaque module de langue équivaut à 100 crédits et dans le programme de sciences sociales, une filière « langues » de 400 crédits a été créée. Les principes fondamentaux de compétence communicative (dans laquelle entrent les fonctions de réception, d’interaction et de production) et de compréhension interculturelle ont été préservés.

Dans le nouveau plan de cours pour l’anglais de 2000[31], cette langue est décrite comme jouant un rôle essentiel dans l’école suédoise. Dans celui pour les langues modernes, le fait de pouvoir parler plusieurs langues est présenté comme important dans le contexte des contacts internationaux, de l’internationalisation du marché du travail, du développement des techniques d’information et de communication, et dans la perspective d’études futures. Comme dans les anciens plans de cours,  une grande liberté est laissée à l’enseignant en matière de méthodes de travail et d’organisation. Que l’apprenant atteigne les objectifs définis constitue la seule contrainte existante. Les ressources informatiques sont de plus en plus utilisées dans les cours.

Un modèle suédois du portfolio européen des langues a été élaboré par le Département de la Formation continue de l’Université d’Uppsala et approuvé par la Commission de validation du Conseil en octobre 2001. Signalons enfin que quelques cours de contenu (essentiellement en sciences sociales, mathématiques, histoire et musique) sont proposés en langue étrangère dans le cadre du Programme SPRINT (Språk- och innehållsintegrerad inlärning och undervisning), lequel correspond au CLIL (Content and Language Integrated Learning, auquel il faudrait ajouter “Teaching”). En 2000, le programme est présent dans environ 4 % des écoles de base et plus de 20 % des lycées. Les langues-cibles associées au programme sont l’anglais (75,5 %), l’allemand (8 %), le français (6 %), l’espagnol (4 %), le finnois (2 %), autres (4,5 %)[32].

Conclusion

La Suède, éloignée géographiquement du continent européen tout en étant résolue à y jouer un rôle d’importance, a toujours eu son regard tourné vers l’étranger. En fait, avant de devenir ce fameux « modèle » dont il a été tant question dans les années 1970, ce pays nordique a été lui-même longtemps à la recherche de modèles dans les domaines éducatif, culturel, social et politique. Cette ouverture vers l’étranger, la réceptivité en matière d’influences qui en a découlé, conjuguées à la nécessité économique (le pays dépend largement de ses exportations), ont engendré un intérêt particulier pour l’enseignement des langues modernes. Le « tournoi des langues », qui s’est opéré dans un système éducatif suédois en pleine mutation, reflétait (et reflète toujours) le statut et l’image dont jouissaient ladite langue-culture et son pays à une époque donnée : langue cultivée pour le français, langue formatrice, représentant le monde du commerce et de la technologie pour l’allemand, et langue universelle pour l’anglais. À cela sont venues s’ajouter, au cours du XIXe siècle, les différentes questions qui alimentaient le débat sur le rôle de l’éducation. Au XIXe siècle, le bénéficiaire de la réforme de l’enseignement secondaire a été l’allemand, qui a pris le relais du latin en tant que langue fondamentale. Pendant près d’un siècle, il est resté la première langue enseignée, avant que ne s’impose l’anglais, alors que le français n’a pu s’imposer que pendant trois années.

Lorsque l’éducation des citoyens est devenue une priorité sociale et économique, c’est la culture utilitaire qui a été privilégiée ; elle s’est d’ailleurs retrouvée au centre du débat en ce qui concerne l’enseignement du latin. L’apprentissage linguistique est devenu un facteur de promotion sociale. Et à partir de la seconde moitié du XXe siècle, il a été présenté comme s’inscrivant dans le processus de démocratisation de l’enseignement (pour l’anglais) et, par là, de la société suédoise. Parallèlement, le fait que l’économie du pays est largement tributaire des exportations a conduit à ce que l'enseignement des langues-cultures constitue un instrument de valeur pour la prospérité de la nation suédoise. Cette idée se retrouve dans les textes officiels présentant l’apprentissage d’une deuxième langue étrangère comme permettant aux jeunes Suédois de remplir de « façon active » leur rôle de citoyens.

La décision prise en 1994 d’accroître le nombre d’apprenants suédois parlant une deuxième langue étrangère constitue l’aboutissement des diverses pressions exercées par le monde suédois de l’industrie et du commerce depuis plusieurs années, pressions d’autant plus convaincantes dans le contexte de récession économique et de préparation à l’intégration européenne. Néanmoins, l’objectif de renforcer l’enseignement linguistique se solde par un semi-échec, vu le fort taux d’abandons enregistrés dans l’apprentissage d’une deuxième langue étrangère. Toujours est-il que la réglementation actuelle remémore en fait l’ancien système éducatif suédois dans lequel les élèves désirant poursuivre des études au lycée et à l’université devaient avoir appris plusieurs langues étrangères.

Une remarque finale : alors que la diversité linguistique a, pendant des siècles, été perçue comme un désavantage ou/et un danger pour l’unité nationale, la Suède s’est transformée en État-nation multilingue. En 2000, ce pays a ratifié la Charte européenne des Langues régionales ou minoritaires et a reconnu cinq langues minoritaires : le same, le finnois, le finnois de la vallée du Torne (dans le nord du pays), le romani et le yiddish. Cette nouvelle orientation s’accompagne de la volonté d’instaurer une politique linguistique. Cette dernière est exprimée dans le Programme d’action pour la Langue suédoise[33] élaboré par un comité gouvernemental et le projet de loi doit être voté dans le courant de l’année 2004. Bien que les objectifs principaux de ce programme soient de renforcer la position du suédois et de faire en sorte que tout le monde en Suède dispose de façon équitable de ressources satisfaisantes pour acquérir le suédois, l’une des mesures proposées recommande que soit renforcé l’enseignement des langues étrangères. Il semble qu’aujourd’hui, comme dans le passé, le monolinguisme ne soit pas de mise en Suède.

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Notes

1       Pour une analyse de la politique des langues dans son ensemble, voir Béatrice Cabau-Lampa, L’enseignement des langues-cultures en Suède: un enjeu multidimensionnel (Presses Universitaires du Septentrion, Université de Lille, 1998, 689 p.).

2       Ce bref historique du système scolaire suédois est essentiellement basé sur l’ouvrage de Gunnar Richardson, Svensk utbildningshistoria skola och samhälle förr och nu (Lund, Studentlitteratur 1999) et sur Sveriges allmänna läroverksstadgar 1561-1905 (Lund Fören. för svensk undervisningshistoria 1921-1930, 11 vol.).

3       Voir Olof Wennås, Striden om latinväldetIdéer och intressen i svensk skolpolitik under 1880-talet (Stockholm, Almqvist & Wiksell, 1966) ainsi que Gunnar Richardson, Kulturkamp och klasskamp – Ideologiska och sociala motsättningar i svensk skol- och kulturpolitik under 1880-talet (Studia Historica Gothoburgensia II, Göteborg, Akademiförlaget, 1963).

4       Statens Offentliga Utredningar, 1946 års Skolkommissions betänkande med förslag till riktlinjer för det svenska skolväsendets utveckling (SOU 1948 : 27, Ecklesiastikdepartementet, 1948).

5       Ibid., 269.

6       Sixten Marklund, Från reform till reform, Skolsverige 1950-1975, del 5 Läroplaner (Skolöverstyrelsen och Utbildningsförlaget, Stockholm, 1987).

7       Per Malmberg, “Språkundervisningen i Sverige i ett historiskt perspektiv”, dans Bror Andered, Torsten Lindblad, Dagens språkundervisning och morgondagens (Rapporter – Planering, Uppföljning, Utvärdering –  R86:40, Göteborgs Universitet: SÖ, 1986, 11-21).

8       Sur le rôle et statut du latin en Suède, voir Emin Tengström, Latinet i Sverige (Stockholm, Bonnier, 1973) et Bo Lindberg, De lärdes modersmål. Latin, humanism och vetenskap (Acta universitatis Gothoburgensis, Göteborg, 1984).

9       W. Sjöstrand, Grunddragen av den militära undervisningens uppkomst- och utvecklingshistoria i Sverige till år 1792 (Uppsala, TIERP, 1941).

10     Statens Offentliga Utredningar (à l’avenir SOU), Betänkande med utredning och förslag angående begynnelsespråket i realskolan (SOU 1938 :32, Stockholm, Ecklesiastikdepartementet, 1938).

11     Statens Offentliga Utredningar, 1946 års Skolkommissions betänkande med förslag till riktlinjer för det svenska skolväsendets utveckling (SOU 1948 : 27, Ecklesiastikdepartementet, 1948).

12     Ibid., 7.  La traduction de la citation en français est de l’auteure.

13     SOU 1948:27, 66.

14     Ibid., 60.

15     Gunnar Holmberg, « Foreign Languages in Swedish Schools » (Stockholm, Skolöverstyrelsen, 1981).

16     Ulrika Tornberg, Chris Sörensen, Tyska (Metodboksserien, Stockholm, Liber Utbildningsförlaget, 1985), 13).

17     Sven Henriksson, “Tyskundervisning i Sverige” (Thèse de doctorat, Université royale de Stockholm, 1960).

18     Elisabet Hammar, “La Française” (Uppsala Studies in Education 41, Acta Universitatis Upsaliensis, 1992).

19     Tamara Neukirch-Scherer, “Die Entwicklung des Deutschunterrichts in Schweden seit 1945 unter Berücksichtigung des schwedischen Deutschlandbildes” (Mémoire pour l’obtention du titre de maître d’université, Université Ludwig-Maximilian, Münich, 1986).

20     Sven Henriksson., op. cit., p. 7 de l’annexe.

21     Ingar Bratt, Engelskundervisningens villkor i Sverige 1850-1905 (Årsböcker i svensk undervisningshistoria, Volym 156, Stockholm-Uppsala, 1984).

22     SOU 1948:27, 149.

23     Utbildningsdepartmentet, Läroplaner för det Obligatoriska Skolväsendet och de Frivilliga Skolformerna (Stockholm, Utbildningsdepartmentet, 1994).

24     European Commission. Directorate-General for Education and Culture, Euridyce, and Eurostat, Key data on education in Europe, Office for Official Publications of the European Communities, Luxembourg, 2003.

25  Statens Offentliga Utredningar, Skola för Bildning – Betänkande av Läroplanskommittén (SOU 1992:94, 1992), 273.

26     Christer Sörensen, Språkvalet i grundskolan – en pilotundersökning (Skolverket, Stockholm, 2000).

27     Snabbprotokoll 2001/02:118, 3 juni 2001, Svar på interpellation 2001/02 :454 om språkstudier i skolan, http://www.riksdagen.se/debatt/0102/prot/118/HTFRAME.HTM

28     Skolverket, Beskrivande data om barnomsorg, skola och vuxenutbildning 2002 (Skolverkets rapport nr 218, 2002) et Skolverket, Barn, elever och personal, Riksnivå (Skolverket rapport nr 244, 2004).

29     Skolverket, Barnomsorg, skola och vuxenutbildning i siffror 2003: Del 2, Skolverkets rapport nr 233 (Fritzes, Stockholm, 2003). Accessible en ligne : http://www.skolverket.se/fakta/statistik/sos/sos032.

30     Skolverket, Nya kursplaner i språk, Nyhetsbrev, 20 december 1999, Nr 20.

31     Grundskolans kursplaner och betygskriterier, Fritzes and Skolverket, Stockholm, 2000.

32     Nixon J., SPRINT Språk- och innehållsintegrerad inlärning och undervisning: Rapport på uppdrag av Skolverket (Skolverket, Stockholm, 2000).

33     SOU 2002:27 Mål i mun – Förslag till handlingsprogram för svenska språket